Lorsqu’un particulier sollicite un prêt immobilier, il peut arriver que la demande soit refusée par la banque.

Dans de tels cas, une attestation de refus de prêt peut être délivrée par un courtier en prêts immobiliers agissant en intermédiaire entre le demandeur et l’institution bancaire en question.

Toutefois, il arrive fréquemment que les vendeurs de biens immobiliers refusent de restituer un dépôt de garantie, versé par les acquéreurs, sur présentation d’une attestation produite par un courtier.

Dès lors, la question de la valeur juridique de ces attestations soulève des enjeux importants, notamment en ce qui concerne leur recevabilité devant les juridictions françaises.

Depuis 2014, la jurisprudence confirme, de manière constante, qu’en s’adressant à un courtier en prêts immobiliers, l’acheteur satisfait pleinement à l’obligation de formuler et de solliciter des demandes de financement auprès des établissements de crédit et, en conséquence, aux obligations issues d’un compromis de vente.[1]

Ces mêmes juridictions confirment également que l’attestation de refus délivrée par un tel courtier possède la même valeur et les mêmes qualités juridiques que les attestations de refus des établissements bancaires.

Cette jurisprudence est également rappelée par les notaires aux termes de la note explicative de CRIDON de Paris.[2]

Récemment, la Cour d’appel de Poitiers aux termes de son arrêt en date du 6 février 2024, a apporté quelques précisions complémentaires concernant les attestations produites par les courtiers en prêts immobiliers et leur valeur juridique par rapport au contentieux du refus de prêts bancaires :

  • Premièrement, s’agissant de sa forme, le courtier « demeure libre d’en déterminer le contenu ».

Ainsi, lorsqu’une telle attestation confirme que « les partenaires bancaires sollicités n’ont pas donné suite » l’utilisation du pluriel dans l’attestation du courtier confirme la sollicitation d’au moins deux établissements bancaires (cf. une exigence courante dans des compromis de vente).

Toutefois, bien que l’attestation de refus établie par un courtier soit juridiquement reconnue comme valable[3], il faut être ensuite capable de produire tous les documents relatifs au dépôt d’une ou de plusieurs demandes de prêt.

En effet, les vendeurs souhaitent souvent vérifier que les conditions des demandes de prêt correspondent aux conditions stipulées aux termes de la promesse de vente.

Le cas échéant, le courtier doit transmettre à ses clients l’ensemble des échanges effectués avec les établissements bancaires et la preuve du dépôt des demandes de prêt. En cas de son refus, il peut être contraint de produire de tels documents par ordonnance du Président du Tribunal au visa de l’article 145 du Code de procédure civile.

  • Deuxièmement, la jurisprudence de la Cour d’appel de Poitiers confirme la liberté des établissements bancaires de produire ou non des attestations de refus.

Ce constant renforce donc davantage la valeur juridique des attestations de refus produites par les courtiers.

  • Troisièmement, la jurisprudence de la Cour d’appel de Poitiers exige des vendeurs à ce qu’ils mettent les acquéreurs en demeure, de justifier de la réalisation ou de la défaillance de la condition suspensive d’obtention d’un prêt bancaire.

Ainsi, selon la Cour, faute d’une telle mise en demeure préalable, la condition résolutoire n’est pas présumée défaillie et les vendeurs ne peuvent pas solliciter le paiement du dépôt de garantie.

Conclusion

Les attestations de refus de prêts bancaires établies par des courtiers en prêts immobiliers ont une valeur juridique significative, surtout lorsqu’elles respectent les critères de véracité, de diligence et d’authenticité. La jurisprudence française tend à reconnaître ces attestations comme des preuves recevables, à condition qu’elles soient émises par des professionnels qualifiés et qu’elles reflètent fidèlement la réalité des démarches effectuées. Ainsi, elles jouent un rôle crucial dans la protection des droits des emprunteurs.

Points d’attention, en pratique pour l’IOBSP :

  • l’attestation de refus délivrée par un courtier en prêts immobiliers possède la même valeur et les mêmes qualités juridiques que les attestations de refus des établissements bancaires,
  • le courtier en prêts immobiliers est libre de déterminer le contenu de son attestation de refus,
  • il est conseillé de vérifier si les vendeurs ont mis les acquéreurs en demeure de justifier de la réalisation ou de la défaillance de la condition d’obtention d’un prêt bancaire,
  • à la demande de ses clients, le courtier en prêts immobiliers doit produire les échanges avec les établissements bancaires relatifs au dépôt des demandes de prêt. A défaut, il peut être contraint de le faire par la justice.

 

En bref :

·         Cass. Civ. 12.02.2014, n°12-27.182,

·         Cour d’appel de Paris, Pôle 4 – chambre 1, 2 décembre 2016, n° 15/08704,

·         CA Paris 31.01.2020, n°18/28529,

·         Cour d’appel de Grenoble, 1ere chambre, 15 février 2022, n° 20/02612,

·         CRIDON de Paris en date du 5 avril 2018 (cf. dossier nr 876426).

 

[1] Cass. Civ. 12.02.2014, n°12-27.182 ; Cour d’appel de Paris, Pôle 4 – chambre 1, 2 décembre 2016, n° 15/08704 ; CA Paris 31.01.2020, n°18/28529 ; Cour d’appel de Grenoble, 1ere chambre, 15 février 2022, n° 20/02612.

[2] CRIDON de Paris en date du 5 avril 2018 (cf. dossier nr 876426).

[3] Pour confirmer la défaillance de la condition suspensive d’obtention de prêt et l’obtention du droit à la restitution du dépôt de garantie.